La mémoire longue du Wallon : plongée au cœur d’un patrimoine linguistique fascinant
Écrit par RADIO 4910 sur 12 janvier 2025
Ce dimanche 12 janvier, dans l’émission « J’peux pas j’ai piscine » diffusée sur RADIO 4910 et animée par Eric Lamblotte, Jean-Marie Jaquet était l’invité du jour. Auteur de l’ouvrage La mémoire longue du Wallon, Jean-Marie Jaquet nous a offert une plongée passionnante dans l’histoire et la richesse de cette langue régionale. Retour sur une conversation captivante.
Un livre pour redécouvrir le Wallon
Paru le 22 novembre 2024 aux éditions Jérômiade, cet essai de 154 pages vendu au prix de 16,60€ s’adresse à tous les amoureux de la culture wallonne. Préfacé par Guy Fontaine, une voix bien connue de la RTBF, l’ouvrage met en lumière les particularités linguistiques des dialectes liégeois et verviétois. Selon l’auteur, le titre La mémoire longue du Wallon résume l’idée que cette langue conserve les traces de plusieurs époques, des origines celtiques à l’influence latine et jusqu’à la francophonie moderne.
Une langue aux racines profondes
Jean-Marie Jaquet commence l’interview en expliquant le titre de son ouvrage. La mémoire longue du Wallon fait référence à la richesse historique de la langue wallonne, qui conserve des éléments remontant à des époques anciennes. L’auteur cite l’exemple de Julos Beaucarne qui disait que le Wallon, « c’est du latin, qui est venu à pied du fond des âges ». Cette métaphore met en lumière la continuité de la langue au fil des siècles, des traces laissées par les peuples celtes, romains et même le latin. Ainsi, certains mots de la langue wallonne, comme bec (petit mot affectueux en Wallon), ou cuepi (cordonnier), viennent directement de l’ancien latin. Il évoque également des mots qui se sont transformés au fil du temps, comme alvesprez (le soir) et cuepi (cordonnier).
Un autre exemple fascinant est le mot betchfessî qui signifie « éplucher les légumes », montrant une combinaison d’influences lexicales locales et historiques. De même, vinâdje pour « vendange » rappelle l’importance des traditions agricoles dans la culture wallonne.
L’auteur a également mis en avant la grammaire raffinée du Wallon. Contrairement au français, le Wallon conserve le subjonctif imparfait et des structures particulières comme l’emploi prépondérant de l’auxiliaire « avoir » dans les verbes réfléchis ou encore le placement atypique des pronoms personnels.
Une langue vivante et imagée
Le Wallon brille aussi par ses expressions imagées et sa manière de jouer avec les mots. Jean-Marie Jaquet a cité des exemples savoureux comme déseurî (désorienté après un changement d’heure) ou encore ciser (passer la soirée). Les répétitions, les diminutifs affectueux et les préfixes ajoutent une dimension poétique à la langue.
D’autres expressions comme aveur des pétèyes dins les ieûs (avoir des étincelles dans les yeux, pour dire être enthousiaste) ou mi-non mi-non (ni oui ni non, une réponse évasive) montrent la richesse émotionnelle et culturelle du Wallon.
Jean-Marie Jaquet souligne que le Wallon est bien plus qu’un simple dialecte : c’est un patrimoine vivant qui conserve des spécificités que l’on ne retrouve plus dans les autres langues, comme le passé simple ou le subjonctif imparfait. Par exemple, en Wallon, on peut dire « Qu’est-ce que vous auriez voulu que je fasse ? » ou « Qu’il aurait fallu que je le sépare, que je le suce ? », des formulations qui paraissent désuètes en français mais qui sont encore vivantes en Wallon.
Le Wallon, selon l’auteur, se distingue également par des constructions grammaticales et des conjugaisons uniques. L’omniprésence de l’auxiliaire avoir pour former le passé composé, même avec les verbes réfléchis, est une autre particularité de la langue. Un exemple classique : « Il a morou » pour dire « Il est mort ». Cette flexibilité permet une grande richesse d’expression, y compris pour décrire des événements dans des contextes précis, comme la date du décès d’une personne : « Il a morou l’an passé ».
Les images et les mots du Wallon
Les subtilités du Wallon se retrouvent aussi dans ses expressions imagées et son vocabulaire coloré. Jean-Marie Jaquet évoque des termes qui sont véritablement intraduisibles, tels que sprachin (écraser) ou flachis (brûlis). L’usage des préfixes et suffixes permet de créer des images vivantes : fiestyante pour une personne accueillante, ou alcise pour parler de la soirée, un dérivé du mot latin vespra (soirée). Le Wallon excelle également dans les jeux de mots et les répétitions : « Mi ma tante, mi mon oncle », une manière d’accentuer une idée
Le Wallon aujourd’hui
En fin d’émission, l’auteur a abordé l’avenir du Wallon. Si une tendance à regrouper les langues régionales se dessine, Jean-Marie Jaquet préfère préserver les spécificités du Wallon liégeois et verviétois, en lien étroit avec les langues germaniques voisines.
Pour conclure, Eric Lamblotte a salué le travail minutieux de l’auteur et invité les auditeurs à découvrir ce livre, véritable hommage à une langue qui mérite d’être transmise et valorisée.
La mémoire longue du Wallon est disponible dans les librairies et permet de redécouvrir un pan essentiel de notre identité culturelle. Comme l’a dit l’auteur : « Le Wallon, c’est un patrimoine précieux à chérir. »
Références du livre
- Titre : La mémoire longue du Wallon
- Auteur : Jean-Marie Jaquet
- Date de parution : 22 novembre 2024
- Éditions : Jérômiade
- Prix : 16,60€
- Préface : Guy Fontaine
- Nombre de pages : 154
Retrouvez l’interview complet de Jean-Marie Jacquet ci-dessous